Son parcours
Yannick JACOB a terminé ses études d’Ingénieur (JUNIA) en 2001 sans avoir réalisé de séjour à l’étranger. Après ses études, il débute sa carrière dans le secteur automobile dans le nord de la France avant de rejoindre le groupe SPIE. C’est en 2006 qu’il est recruté par la MEL – Métropole Européenne de Lille -. Après quatre ans en tant que chef de projet, il devient chef de service à la Direction des Transports où il supervise l’organisation et l’optimisation du réseau de transports publics, ce qui comprend métro, tramway, bus et vélos en libre-service. Il travaille en outre au renouvellement de plusieurs contrats de délégation de service public. Il pilote également des projets de partenariats européens et nationaux avec diverses villes et métropoles européennes.
En 2019, après 13 ans à Lille, il déménage à Montpellier avec sa famille et rejoint Montpellier Méditerranée Métropole en tant que Directeur des Mobilités, puis Directeur du Pôle Mobilité. Il mène notamment l’opération de gratuité des transports de la Métropole ainsi que le pilotage de projets de tramways et de lignes de bus à haut niveau de service.
Yannick JACOB n’a alors pas réellement de désir de mobilité internationale. Ses enfants sont au collège et au primaire et le poste à Montpelier est passionnant, les mobilités étant une priorité très forte du mandat politique.
Mais à l’été 2023, il découvre une opportunité via une information du réseau CODATU sur LinkedIn à propos d’un poste d’ETI (Expert Technique International) ) en Thaïlande. Il en parle à son épouse : « il se trouve qu’on était presque partis pour la Nouvelle Calédonie, il y a dix ans. J’avais fait les différentes démarches et passé les entretiens mais finalement on avait décliné. On n’était pas prêts ».
Ne connaissant pas Expertise France (EF), mais attiré par le poste axé sur la mobilité urbaine durable, il postule en juillet 2023. Rapidement recontacté par EF, il passe un entretien d’une heure en visio avec la responsable du programme et une personne des ressources humaines. Deux jours après il reçoit un mél comme quoi il est présélectionné et commence alors les discussions sur la rémunération et les primes (en fonction de la grille de l’organisation et de son niveau dans la Fonction Publique) « C’est important de discuter des éléments de rémunération à ce stade car ensuite votre candidature est potentiellement présentée officiellement à la Thaïlande ».
Son poste, financé par la DG Trésor du Ministère de l’Économie dans une optique de diplomatie économique, implique un entretien avec le service économique de l’Ambassade de France en Thaïlande et le bénéficiaire, la Rail Technology Research and Development Agency (RTRDA). (https://www.rtrda.or.th). Il passe l’entretien directement avec le Président de l’époque auprès duquel il doit être placé
Mi-septembre 2023, il reçoit une réponse positive pour son recrutement. Après avoir suivi toute la procédure de détachement, quelques formations à EF, et surmonté les habituels difficultés de visas, Yannick JACOB prend son poste début 2024.
Le fonctionnement sur place
Ayant appris l’anglais au lycée, Yannick JACOB s’inquiétait de son niveau de pratique. Lors de son poste à la Métropole de Lille, il reprend l’usage de l’anglais pour des projets européens. Cependant, à Montpellier, les occasions de pratiquer étaient rares. A titre personnel, il part en vacances aux USA en août 2023 et reprend sérieusement la pratique de l’anglais après la signature de son contrat. À son arrivée en Thaïlande, il réalise que ses craintes étaient infondées : « Mes interlocuteurs ont un très bon niveau d’anglais mais cela reste des étrangers qui parlent l’anglais ».
Il est conseiller du Président de la RTRDA. « Toutefois, entre le recrutement et la prise de fonction, le Président a changé », il n’est donc pas auprès de la personne qui l’a recruté. Ainsi, à son arrivée, il lui faut à nouveau démontrer la pertinence de son profil. Sa mission est d’accompagner la réflexion de la RTRDA sur l’implantation de transports ferrés (train ou tramway) dans un pays où la voiture règne en maitre, avec des embouteillages monstres même si des plans stratégiques ont déjà été adoptes. Les Thaïlandais qu’il rencontre sont très ouverts et très friands d’informations variées pour élargir leurs horizons (« Ils consultent beaucoup pour se forger leur propre opinion»). Pour cela, Yannick JACOB va notamment organiser différentes visites d’études pour montrer le savoir-faire français. Il placera sans aucun doute Montpellier dans le parcours.
Naviguer dans la hiérarchie complexe est un défi. Bien qu’il signe un contrat avec EF, il dépend de la direction du Trésor en France et est positionné auprès du Président de la RTRDA. «*j’ai une lettre de mission qui comprend 4 signatures -dont la mienne ». Grâce à son expérience de fonctionnaire territorial, il sait s’adapter à ce cadre.
En termes de management, il doit s’adapter à une manière de travailler procédurière (« On signe tout le temps ») et à une agence en mouvement (« L’agence est jeune, en pleine construction et il y a eu déjà pas mal de mouvements.) Tout se passe dans une atmosphère très feutrée et de manière pudique « il n’y a pas de conflit apparent » ou d’effusion.
Les Thaïlandais sont très accueillants et attentifs dans les présentations. « Ils ont une haute estime de l’expérience française » mais aussi de la construction législative et des lois de décentralisation. L’intérêt n’est donc pas que technique et sur l’organisation et la décentralisation « «la France a une histoire à présenter ». Pour Yannick JACOB, il est très intéressant de mener ces discussions car les questionnements sont très pertinents et l’approche différente liée aux différences culturelles, l’amène à élargir ses points de vue. «Ainsi, la forte volonté de maitrise attendue par la partie thaïlandaise m’amène à leur évoquer les différents modèles de partenariats publics-privés qui peuvent exister en France ».
Les enjeux personnels
Vis-à-vis de sa collectivité d’attache, Yannick JACOB a attendu de recevoir les éléments définitifs de la part d’EF pour annoncer son départ. Il appelle successivement son DGS et sa Vice-Présidente: « je n’étais pas très serein car annoncer son départ n’est jamais chose facile d’autant plus qu’encore une fois mon poste à Montpellier était très intéressant». Ils ont tous les deux bien accueilli cette annonce puis il est reçu par le Président de la Métropole dans le cadre d’un échange informel. Le Président lui a indiqué que c’était une opportunité très intéressante mais aussi une expérience personnelle enrichissante. Il dépose alors sa demande de détachement mi-octobre qui est gérée parfaitement entre les RH de la Métropole et EF. Il quitte son poste mi-décembre, en prenant ses derniers congés. « je suis parti le jour de la mise en œuvre de la gratuité sur le réseau de transports de la Métropole ».
Comme la famille part loin et pour longtemps, ils profitent des congés de Noël pour faire un tour de France et voir famille et amis.
Administrativement, le détachement permet à Yannick JACOB de poursuivre son avancement dans sa collectivité d’origine.
Sur le plan familial, son épouse, également fonctionnaire territoriale, obtient une disponibilité pour suivi de conjoint. Leurs deux filles de 11 et 13 ans s’adaptent bien : « Bangkok est très sûre comme ville et l’intégration au Lycée Français s’est vite réalisée ».
Pour leur installation, la famille contacte les collègues d’EF sur place pour trouver logement et autres questions administratives. Ils sont mis en lien avec une agence de location de confiance. Ils choisissent un AirBnB durant un mois avant de trouver la bonne location. Pour le départ, la famille est partie avec le minimum et a fait venir par container une vingtaine de cartons « Il a fallu attendre 4 mois pour leur arrivée, que l’on a fêtée comme des cadeaux de Noel ». Par ailleurs, ils doivent acheter un certain nombre d’équipements : « En Thaïlande, les logements sont loués meublés mais avec le strict nécessaire. Par exemple, il n’y a pas de vaisselle ».
Sur place, Yannick JACOB découvre une société très respectueuse: « les transports publics ne sont pas dégradés, chacun attend le bus en file indienne. Il y a peu de klaxons alors que la circulation est un enfer ». En revanche le rapport à la pollution est vraiment différent : « l’eau du robinet est trop chimique, on ne la boit pas. Et mes filles ont été surprises car il n’y a pas de tri des déchets ».
Et le retour ? Liens avec Montpellier
Le retour à Montpellier n’est pour l’instant pas à l’ordre du jour car Yannick JACOB débute juste sa mission de deux ans (jusque fin 2025). Remplacé, il a eu quelques échanges avec son successeur et maintient également des échanges avec des collègues. Les échanges sont toujours bienveillants et peuvent parfois concerner les anciens dossiers. Il y a également de nombreux questionnements sur notre adaptation personnelle en Thaïlande. Bien qu’il représente l’identité et l’expertise de Montpellier à l’international cet aspect n’est en revanche pas questionné ou abordé par l’administration de la Métropole.
Il est bien conscient qu’il ne sera pas attendu lors de son retour qu’il devra se préparer : « loin des yeux loin du cœur ».
Par ailleurs, juste avant son départ, Yannick JACOB a réussi l’examen professionnel d’ingénieur en chef territorial. Il est inscrit sur liste d’aptitude. Il n’a pu se faire nommer avant son départ car il était dans l’incapacité de réaliser les formations nécessaires dans le délai imparti.
Son conseil
Pour Yannick JACOB « si l’occasion se présente, il ne faut surtout pas hésiter ». S’il avait su, il aurait sans doute tenté ce type d’expérience plus tôt. Toutefois, il reconnait « il fallait mes 20 ans d’expérience professionnelle pour prendre ce poste ».
Sa recommandation est « de faire preuve de souplesse et d’ouverture, d’adaptabilité car jamais rien n’est tracé d’avance ».
Entretien réalisé par Yannick Lechevallier – Juin 2024