Sandrine GOUMARD a 49 ans. En 2011, elle quitte la direction du Pôle Communication, Culture et Vie locale de la Ville de Fontainebleau et part à Singapour, suivant son conjoint muté dans la Ville-Etat. A son retour, elle assure différents postes de Directrice de communication pour des communes. Elle est aujourd’hui responsable du servie valorisation des politiques régionales à la Région Auvergne-Rhône Alpes.
Son parcours
Après une maitrise de communication politique et publique obtenue à l’UPEC (Université Paris Est-Créteil), Sandrine GOUMARD intègre en 1996, le service de la Communication et des Animations départementales de Seine et Marne Attractivité (association 1901 rattachée au Département) pendant 10 ans.
En 2006, elle change de collectivité et rejoint la ville de Montereau-Fault-Yonne comme DGA Communication et Culture. Elle y reste 4 ans et 7 mois avant de prendre la direction du Pôle Communication, Culture et Vie Locale de la Ville de Fontainebleau.
Son mari se voit alors proposer un poste à Singapour par son entreprise. L’expatriation n’était pas à l’ordre du jour mais le couple saisit l’occasion. La démission est présentée au Maire de Fontainebleau et la famille part pour Singapour durant 2 ans : une parenthèse familiale pour Sandrine GOUMARD.
Au retour après 2 années, Sandrine GOUMARD ne pense pas revenir dans les collectivités mais le Maire de Fontainebleau, ayant été informé de son retour, la sollicite. Elle réintègre la Mairie en mars 2014. Elle y reste 4 ans et 7 mois.
Un rapide contrat au sein du SIARCE puis elle intègre la ville d’Oulins (Rhône) en 2019 pour 3 ans avant de rejoindre le Conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes en 2022.
Son départ
Le départ de la famille à Singapour est réalisé assez rapidement, saisissant une opportunité professionnelle offerte au mari de Sandrine GOUMARD. Elle vient juste d’être embauchée (sur un poste de contractuelle) par la Mairie de Fontainebleau (en octobre 2009) lorsqu’elle annonce en mars au Maire puis au DGS son intervention de mettre fin à son contrat pour suivre son conjoint dès l’été 2010. Ceux-ci sont bien évidemment assez déçus d’autant que les projets en termes de communication sont importants mais ils comprennent la situation et la rupture du contrat se réalise en bons termes (Sandrine GOUMARD reviendra à la suite de son expatriation, à Fontainebleau).
Le fonctionnement sur place
Cette expatriation étant organisée par la société du mari de Sandrine GOUMARD, ceux-ci ont la possibilité d’avoir un premier voyage pour identifier un appartement à louer. L’idée est de partir pour 1 an (finalement cela sera 2 années) donc sans grand déménagement : « on a loué un meublé et on est parti avec trois box avions c’est tout ». Le couple choisi un quartier différent du quartier des expatriés français pour son logement (il existe plusieurs quartiers d’expatriés en fonction des nationalités). Mais les enfants sont inscrits au lycée français pour continuer le même cursus. Ils ont 6 et 9 ans : « c’est le bon âge » selon Sandrine GOUMARD. Sur place, ils se font rapidement des amis et apprennent les langues étrangères facilement.
S’ils ne sont pas logés dans le quartier des expatriés « on les retrouvent extrêmement facilement car on est tous dans la même situation et nous avons les mêmes besoins ». Et au-delà du soutien financier de la société employant son mari, elle doit gérer l’ensemble des démarches (« pas de soutien particulier de l’ambassade de France »).
Les enjeux personnels
Sandrine GOUMARD ne travaille pas durant cette expatriation. D’une part, son anglais n’est pas au niveau professionnel pour pouvoir postuler à certains postes et d’autre part, il n’existe pas, à Singapour, de structure d’accueil périscolaire ce lui imposerait, en cas d’activité professionnelle, d’avoir une personne à domicile pour s’occuper des enfants, ce qu’elle ne souhaite pas. Mais surtout, l’idée du couple est de profiter pleinement de cette expérience, notamment pour voyager dans toute la zone Asie (« j’organisais les voyages de la famille ») et aussi d’avoir cette parenthèse professionnelle pour profiter des enfants.
Sandrine GOUMARD a aussi compris, après un an, en discutant avec des amis expatriés, qu’elle ne cotisait plus à sa retraite et qu’il fallait penser à cotiser de soi-même pour ne pas perdre les trimestres liés à l’expatriation.
Au plan local, Sandrine GOUMARD s’est bien préparée « j’ai lu de nombreux livres, les blogs d’expatriés pour comprendre l’organisation administrative du pays, ce qui peut être fait et ce qu’on ne doit pas faire, les codes culturels ». Malgré cela, c’est un choc : « la ville de Singapour vit 24h/24. Je me suis vu faire des courses à 4h du matin ». Il y a aussi une petite déception car ils s’installent dans un quartier avec uniquement des familles singapouriennes mais le lien reste difficile à tisser.
L’idée aussi est d’éviter les raccourcis trop rapides. Ainsi elle voit une ville très sûre avec « une sécurité totale » mais il faut rapporter ce fait à la taille très petite de la Ville-Etat (la taille de la métropole de Rennes avec 12 fois plus d’habitants).
Et au retour ?
Lorsque Sandrine GOUMARD annonce son départ à la Ville de Fontainebleau, elle est alors contractuelle. La situation lui autorise une « démission pour rapprochement de conjoint ». Cela implique la fin de tout salaire durant cette expatriation mais cela lui permet aussi de s’inscrire à Pôle Emploi au retour en France en août 2013. Sa priorité est alors de réinstaller ses enfants dans leur quotidien (retour juste avant la rentrée des classes pour faciliter l’intégration).
Puis elle prend aussi le temps de réfléchir à son nouveau projet professionnel. L’idée est de profiter de ce temps pour changer sans doute de lieu, d’environnement professionnel : « je me suis laissé le temps de trouver le job que je souhaitais ». Elle cherche alors, dans un premier temps, à intégrer un service communication d’une entreprise privée. Elle postule différents postes et passe plusieurs entretiens. L’expérience d’expatriation n’est pas abordée ou très vite évacuée à chaque fois.
Finalement, après six mois, le Maire de Fontainebleau la recontacte. Sa remplaçante vient de démissionner et le Maire lui propose de postuler à nouveau pour le poste de Directrice du Pole Communication (au regard du travail accompli début 2010). Elle est retenue et retrouve son équipe laissée 3 ans plus tôt. Son expérience à Singapour ne sera pas évoquée par le Maire « il y avait des enjeux importants matière de communication et l’expatriation apparaissait accessoire ». Avec les collègues quelques questions sur « la vie là-bas ? comment je me suis occupée ? » etc. Mais aucune question n’aborde les différences professionnelles. Dans ses autres postes, dans d’autres villes, cette expérience intéresse peu et ne sera jamais valorisée par un service Relations Internationales par exemple.
L’appréciation de cette expérience est plus dans le non-dit selon Sandrine GOUMARD : le fait d’avoir tout quitté en termes de situation professionnelle et personnelle pour une expérience hors du commun « cela génère l’idée que l’on va de l’avant, qu’on a de l’énergie ». Selon elle, cela démontre quelque chose de positif sur la personne. Mais en même temps, Sandrine GOUMARD était inquiète pour son retour avec « un trou de 2 ans dans le CV ».
Finalement, après 10 ans à la question sur ce qui lui reste de cette expatriation, Sandrine GOUMARD répond immédiatement « Plein de choses ». Et notamment la liberté et l’ouverture, l’envie de découverte. Cela s’est concrétisé récemment « on a décidé de venir sur Lyon, on a tout quitté pour venir s’installer, sans crainte ».
C’est notamment cette diminution des craintes qui revient à plusieurs reprises. « Pour l’anglais, on n’a plus peur de faire des fautes, on parle c’est tout », mais aussi quand la famille vit autre chose, lors des voyages ou des rencontres, il y a plus de recul. Enfin, au regard des nombreuses situations rencontrées, « vécues là-bas », ils relativisent fortement ici « lorsqu’on ne se sent pas bien ».
Selon Sandrine GOUMARD, c’est à chaque personne de valoriser cette expérience auprès des employeurs, de montrer « qu’on a lâché prise une première fois » et donc que l’on a moins de peurs.
Enfin elle nous précise qu’au retour, elle prend un peu plus conscience « du beau pays dans lequel on vit » d’une part avec les paysages divers mais aussi pour la démocratie ou l’Etat social présent aux côtés des habitants.
Son conseil
Pour Sandrine GOUMARD, une possibilité d’expatriation « est une expérience exceptionnelle qu’il ne faut pas refuser ». Mais elle nous alerte sur les risques du retour, après « cette parenthèse ». « Durant deux années, on a été déconnecté ; les enfants vivent des choses exceptionnelles, on voyage, etc. Et l’entourage a continué à vivre sa vie de son côté. Quand on revient, il faut refaire sa place, retisser les liens » et réapprendre un peu le quotidien d’avant l’expatriation. «la vie continue en France et il faut retrouver sa place humblement ».
Et finalement, pour le retour professionnel « il ne faut pas avoir d’inquiétude, juste savoir qu’il faudra bouger et anticiper cela ».
Entretien réalisé par Yannick Lechevallier
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Juillet 2022