Rose-Anne BISIAUX


Réseau France (MEAE, Alliance française, Expertise France, …)DétachementRevenu.e dans une autre collectivitéAlbaniePlus de cinq ansBrésil

Rose-Anne BISIAUX a 42 ans. Elle est aujourd’hui Directrice de la culture de l’agglomération Pau Béarn Pyrénées et de la ville de Pau. Rose-Anne BISIAUX est territoriale depuis 2002. Elle est aujourd’hui attachée principale.
Entretien réalisé en juin 2020

En 1999, Rose-Anne BISIAUX part pour un an au Mexique dans le cadre d’un programme d’échanges pour sa 3ème année à Sc Po Lille. Cette première expérience est un grand saut (« il n’y avait pas de culture internationale dans ma famille ») : ce sera le déclic. Rose-Anne BISIAUX attrape le virus du voyage et confirme son intérêt pour l’apprentissage des langues.

Elle en profite pour réaliser un stage au Guatemala, au service de coopération et d’action culturelle de l’Ambassade de France, lors duquel elle réalise un état des lieux des ONG présentes.

A son retour, elle candidate dans un Master à l’Université de Clermont-Ferrand : elle intègre le Master « Carrières diplomatique, internationale et européenne » en 2001. Elle y découvre la « Coopération décentralisée » et après avoir réalisé son stage au sein de l’ARRICOD (l’association des Responsables RI des collectivités), son diplôme en poche, elle est recrutée au Conseil régional Nord Pas de Calais comme chargée de mission Relations Internationales. Elle y reste 8 mois avant de rejoindre la Communauté urbaine de Dunkerque.

Elle est alors durant cinq années, chargée de mission Relations Internationales. Puis Rose-Anne BISIAUX est nommée Directrice adjointe Stratégie, partenariats, Europe et international de l’agglomération. En 9 ans elle se déplace dans de multiples pays, organise beaucoup de projets et accueille de nombreuses délégations internationales. Elle assure même la présidence de l’ARRICOD de 2009 à 2011.

L’envie émerge alors de vouloir aller voir un peu ailleurs, « de l’autre côté ».

Rose-Anne BISIAUX commence sa veille sur le site de Transparence au cours du mois de mars-avril 2011 et candidate à l’été 2011 pour deux postes de COCAC (Conseiller de Coopération et d’Action Culturelle). Mais au cours d’une conférence, elle rencontre un responsable RH du MAE. S’ouvrant à lui de ses intentions et de sa candidature, il l’informe qu’elle a peu de chance d’avoir un poste de COCAC à la première candidature. Elle rajoute alors deux vœux complémentaires dont le poste d’Attachée de coopération technique à Brasilia.

En octobre 2011, elle est convoquée à un entretien, puis plus de nouvelles. L’attente est un peu longue jusqu’en février 2012, quand elle reçoit un message du MAE : elle est retenue.

Durant cette phase, dès le début, Rose-Anne BISIAUX avait prévenu sa DGA (« elle m’avait encouragée »). Heureusement car au cours de la sélection, le COCAC de Brasilia avait contacté sa DGA pour avis…

À partir de février 2012, c’est le branle-bas de combat : le dossier administratif est complexe et volumineux (visites médicales, procédure pour le visa, …). Mais cela se passe bien (« le dossier est assez bien fait et on a constamment un contact gestionnaire au MAE »). Seule incertitude, la rémunération : « jusqu’à la signature du contrat, on ne connait pas son salaire ».

Ce sera donc un départ à l’Ambassade de France à Brasilia durant trois ans.

Puis elle choisit de rester dans le réseau diplomatique mais elle souhaitait revenir en Europe. Et l’intérêt pour un poste de COCAC s’était renforcé (notamment pour avoir un volet de management plus important dans son quotidien ainsi qu’un champ plus large d’action). Ainsi elle repostule directement sur le site Transparence du MAE, en 2014, pour un poste de COCAC en Albanie à Tirana, qu’elle rejoint donc en septembre 2015.

Le fonctionnement sur place

Pour sa première expatriation, la phase qui précède le départ est un peu anxiogène : va-t-on avoir les visas à temps, etc… ?

En juillet 2012 ; elle réalise les deux semaines de stage du MEAE avec sensibilisation à la sécurité, une formation aux « bons gestes », etc.

Puis c’est le départ. Rose-Anne BISIAUX choisit l’option de louer un appart-hôtel pour les premières semaines qui lui est conseillé par l’Ambassade. Une location de voiture est aussi prévue.

Il lui a fallu un gros mois pour trouver un appartement meublé (elle avait fait le choix de partir avec simplement quelques valises…).

Brasilia, dans le réseau diplomatique français, est une grosse ambassade où se côtoient les diplomates de carrière mais également les agents détachés d’autres ministères ou administrations, ainsi que les agents locaux. Un des avantages est qu’il y a beaucoup d’expertises diverses. Rose-Anne BISIAUX est la seule issue de la fonction publique territoriale.

Lorsque vous partez avec le MAE, le premier contrat est de deux ans. Puis vous pouvez renouveler votre contrat pour votre poste, pour deux contrats d’une année supplémentaire.

Pour sa seconde expatriation, elle décroche « un très beau poste » comme COCAC en Albanie, à Tirana, « au cœur de l’Europe ». Son poste est très différent : petite ambassade donc très nombreuses fonctions et grande polyvalence. Elle s’occupe du pilotage de l’ensemble de la coopération bilatérale (culturelle, scientifique, éducative, technique) en lien avec le réseau des alliances françaises, assure un management de proximité (quelques personnes) mais aussi à distance avec les alliances réparties sur le territoire albanais. Elle acquière alors des réflexes qui lui seront très utiles dans son poste à son retour en France.

Par ailleurs, en expatriation, « vous avez des budgets contraints ce qui oblige à être créatif et aussi très débrouillard » : « en France, on vit dans un pays qui fonctionne ». Au Brésil et en Albanie, elle apprend à aller au plus direct sans se préoccuper de problèmes qui n’en sont pas . Cette habitude du système D permet au retour en France de trouver des solutions plus facilement.

Les enjeux personnels

Au plan personnel, au Brésil, Rose-Anne BISIAUX reconnait une difficulté à rencontrer véritablement des brésiliens et à tisser des liens : « on reste une expat, une étrangère ». Chacun sait que vous ne resterez pas longtemps, il faut arriver à dépasser les barrières culturelles. Par ailleurs la société brésilienne est très inégalitaire socialement, ce qui rajoute à la complexité des relations. Mais l’avantage d’une grande capitale est par contre de pouvoir tisser des liens avec les collègues des ambassades européennes notamment…

Elle apprend aussi les grandes distances : « quand vous partez à Récife, c’est cinq heures de vol ». Donc en arrivant à Tirana -2h30 pour les vols directs avec Paris – elle a l’impression d’être chez elle.

Au plan organisationnel, Rose-Anne BISIAUX recommande la Mutuelle du MAE. Simplement il faut accepter le système où « tu payes puis tu es remboursé ». Cela fonctionne bien mais la première prise de sang à 300 € fait un choc tout de même.

Les relations avec sa collectivité d’origine

En termes de carrière, Rose-Anne BISIAUX recommande de privilégier le statut du fonctionnaire en détachement sur contrat quand c’est possible. En effet, à chaque échéance, sa carrière de territoriale a pu évoluer sans qu’elle ne soit pénalisée : « c’était à moi de rappeler ma RH à Dunkerque pour chaque avancement : j’avais mes alertes sur mon calendrier. Si je n’avais pas écrit ces mels annuels, la RH n’aurait sans doute pas suivi mon dossier. »

Professionnellement, Rose-Anne BISIAUX n’a pas maintenu d’autres contacts avec sa collectivité d’origine et, de son côté, cette dernière n’a pas cherché à utiliser ce relais dans le réseau diplomatique international.

Et après ? Le Retour

 

« Je savais que le retour ne serait pas évident ». Mais n’ayant pas pour objectif de réintégrer sa collectivité à l’issue de son détachement, elle était en recherche d’opportunités assez en amont de la fin de son second contrat de COCAC en Albanie. A l’été 2018, soit au début de sa dernière année de contrat avec le MAE, elle commence à activer ses réseaux : « je voulais revenir en collectivité mais pas nécessairement sur un poste lié à l’international ». En tant que COCAC en Albanie, elle est chargée de la coopération culturelle et mène de nombreux projets dans tous les champs de la culture. Elle souhaite ainsi poursuivre et cherche dans ce domaine « je visais une direction de la culture ».

Elle tente Pau. Elle décroche un entretien avec le DGS pour qui son passage au MAE et son expérience de la culture en Albanie est un gros plus. Puis la rencontre avec le Maire François Bayrou confirme le recrutement. Il ne suffit plus que de caller le calendrier.

Rose-Anne BISIAUX informe donc son ambassadrice puis fait un courrier au MAE pour engager une rupture de son contrat, effectue son préavis et arrive à Pau en février 2019.

Son conseil

D’après Rose-Anne BISIAUX, « en tant que territoriale, on a déjà le bagage et la compétence ». Il faut prendre conscience que l’on a tous les atouts en main et l’expatriation est alors possible. Elle dépend de sa capacité d’adaptation et d’une grande ouverture culturelle. « Ce choc culturel, on le voit de suite ». Il faut alors laisser de côté ses certitudes. De toute façon « cela ne va pas se passer comme on l’a imaginé » et si les gens sont en retard, on ne les changera pas : il faut s’adapter « à Rome comme les Romains ».

Inutile de râler. En plus « c’est nous qui venons » nous rappelle-t-elle. Une expatriation est une « migration » qu’il faut prendre comme telle.

Au retour, cette expérience apparait très riche. Certes épuisante la première année car il y a un choc culturel inévitable et une adaptation professionnelle exigeante. Mais Rose-Anne BISIAUX a surtout réalisé des choix cohérents à chaque étape qui ont enrichi sa carrière et lui permettent aujourd’hui d’exercer ses fonctions actuelles.

 

Fiche rédigée par Yannick LECHEVALLIER

https://www.linkedin.com/in/yannick-lechevallier-23059819/

Juin 2020


> Contacter sur LinkedIn