Emmanuelle LEROY CERQUEIRA


DisponibilitéDe six mois à moins d’un anRevenu.e dans sa collectivitéAutreBrésil

Emmanuelle LEROY CERQUEIRA a 46 ans. Elle a réalisé toute sa carrière à la Communauté urbaine de Dunkerque où elle entre en 1999, rejoignant le Président Michel DELEBARRE, grand militant de la coopération européenne entre territoires. Elle réalise de nombreuses missions en Europe avant de s’orienter vers la planification urbaine et l’aménagement. Mais lors d’une mission dans le cadre d’une coopération décentralisée, elle rencontre un interprète brésilien avec lequel elle se marie quelques mois plus tard . Avec l’accord du directeur général, elle pose une disponibilité pour rapprochement de conjoint et part vivre au Brésil un an, en 2012. A son retour tout change…

Emmanuelle LEROY CERQUEIRA a 46 ans. Elle a réalisé toute sa carrière à la Communauté urbaine de Dunkerque où elle entre en 1999, rejoignant le Président Michel DELEBARRE, grand militant de la coopération européenne entre territoires. Elle réalise de nombreuses missions en Europe avant de s’orienter vers la planification urbaine et l’aménagement. Mais lors d’une mission dans le cadre d’une coopération décentralisée, elle rencontre un interprète brésilien avec lequel elle se marie quelques mois plus tard .   Avec l’accord du directeur général, elle pose une disponibilité pour rapprochement de conjoint et part vivre au Brésil un an, en 2012. A son retour tout change…

SON PARCOURS

Urbaniste, Emmanuelle LEROY CERQUEIRA se décrit comme « une fonctionnaire territoriale enthousiaste, passionnée par le formidable terrain de jeu que représente le territoire dunkerquois et ses dynamiques de transformation ». Recrutée à la Communauté urbaine en mars 1999 en tant qu’attachée territoriale contractuelle, elle y a passé, à ce jour, l’intégralité de sa carrière professionnelle.

A l’issue de trois années passées à l’Institut d’études politiques de Lille, elle suit en 1997 une année d’études en relations internationales à l’Université du Kent (Grande Bretagne). En 1999, à la fin de son DESS (Master) d’Urbanisme Ville et Projets à l’UFR de Géographie de Lille (futur Institut d’Aménagement et d’Urbanisme (IAU) de Lille), elle réalise son stage au sein de l’Agence d’Urbanisme de Lille dans le cadre d’une participation à un programme d’Eurocities. Son diplôme obtenu, elle est recrutée par Michel DELEBARRE à la Communauté urbaine de Dunkerque avec qui elle a pu partager de nombreuses discussions lorsqu’il enseignait à l’Institut d’études politiques de Lille. C’est lui qui l’initie au rôle essentiel des villes  et des territoires dans la construction européenne.

Elle cherche ainsi à combiner ses deux centres d’intérêt : l’urbanisme sur son territoire de cœur (le dunkerquois) et l’international. De 1999 à 2005, elle est chargée de mission pour les Partenariats institutionnels et financiers. Au-delà du Contrat d’agglomération et du CPER, elle participe à de multiples projets de l’agglomération en lien avec le service Relations Internationales.

En 2005, Emmanuelle LEROY CERQUEIRA est nommée cheffe de projet Europe. Son rôle est « de faire atterrir l’idée européenne sur le territoire ». Elle est alors au cœur des projets européens auxquels participe la Communauté urbaine de Dunkerque : projets de coopération, dialogue territorial européen, lobbying à la Commission européenne et positionnement dans les réseaux européens. Mais l’Union Européenne évolue à cette époque : objectifs contradictoires de la stratégie de Lisbonne, des dossiers qui glissent trop vers un contrôle financier tatillon, un reporting constant et beaucoup moins sur la défense de l’idée européenne ou l’aménagement urbain. Sur la route vers Stockholm, pour une nouvelle réunion européenne,   elle fait demi-tour. S’en suit un burn out. En accord avec son DGS elle change de domaine d’intervention et devient Directrice de la planification urbaine et de l’aménagement de 2009 à 2012.

Elle ne quitte pas totalement l’international car elle collabore à de multiples projets menés par le service Relations internationales de l’agglomération (en Algérie ou au Brésil).

Lors d’une mission à Vitória (ville partenaire au Brésil), la direction de la planification urbaine est sollicitée pour un déplacement de 15 jours dans le cadre des ateliers de Cergy. Personne ne se porte volontaire dans son service et c’est donc elle qui part. Cette mission est passionnante mais surtout, Emmanuelle LEROY CERQUEIRA rencontre l’interprète brésilien : « ma vie a alors  basculé ». En 2012 elle se marie avec Sandro et demande une disponibilité pour rapprochement de conjoint. La Communauté urbaine de Dunkerque lui accorde en mars 2012 une disponibilité d’un an.

Au retour en 2013, la communauté urbaine ne lui propose pas de postes très intéressants dans un premier temps. Ce n’est que plusieurs années après son retour quelle retrouve un poste avec des enjeux importants : en 2021, elle est nommée Directrice Attractivité et Emploi.

SON DÉPART

A Dunkerque, Emmanuelle LEROY CERQUEIRA est en poste depuis 13 ans quand elle souhaite partir. Elle vient de finaliser l’élaboration du premier plan d’urbanisme communautaire après trois années de travail acharnés et de nombreux sacrifices personnels. Elle a besoin d’une pause, « de faire un pas de côté ». Elle négocie avec son DGS une disponibilité d’un an pour rapprochement de conjoint.

L’idée est de faire une pause de douze mois et de revenir à la CUD ensuite.

 LE FONCTIONNEMENT SUR PLACE

Sur le plan personnel, quand elle arrive au Brésil, Emmanuelle LEROY CERQUEIRA ne parle pas le portugais. Elle est alors face à un réel défi pour exister « pour ne pas être simplement la femme de ».

Elle apprend rapidement la langue locale (« j’avais un bon professeur particulier ») et commence à donner des cours particuliers de français aux enseignants et étudiants de l’université (en renfort). Après quelques semaines, elle se débrouille  suffisamment bien pour pouvoir participer au réseau de journalistes citoyens Global Voices et elle fait quelques articles en français et en portugais, notamment sur la question des droits humains.

Parallèlement elle s’active comme « manager » d’un artiste brésilien pour qui elle organise une tournée en France « je me suis révélée d’autres centres d’intérêts ». A son retour d’ailleurs, le monde culturel la tente.

Par ailleurs, avec son choix de disponibilité pour rapprochement de conjoint, Emmanuelle LEROY CERQUEIRA abandonne tout salaire. Au Brésil, avec son mari et un seul salaire local, ils s’organisent pour limiter au maximum les dépenses. « On apprend la sobriété » : pas de voiture, petite maison équipé au minimum, …

LES ENJEUX DE COMPÉTENCES

Avant son expatriation, Emmanuelle LEROY CERQUEIRA mobilise déjà l’expérience acquise dans les projets européens qui nécessitent écoute, dialogue permanent et compromis. Dans son nouveau poste en 2009 comme directrice de la planification urbaine « effort d’écoute permanent, interaction avec les autres parties prenantes et recherche de l’intérêt commun étaient des pratiques habituelles ». Ainsi, pour Emmanuelle LEROY CERQUEIRA, son « savoir-faire dans le dialogue territorial vient directement du travail avec les institutions européennes. »

En 2013, lorsqu’ Emmanuelle LEROY CERQUEIRA revient avec son mari (cf § et au retour ? ci-après), elle prend conscience qu’elle doit faire évoluer son rapport au travail : « mon homme quitte tout pour moi et vient vivre à Dunkerque. Je me dois donc d’équilibrer autrement ma vie professionnelle et ma vie personnelle. ». Elle porte alors un autre regard sur la posture du cadre dirigeant. « à 33 ans, j’étais déjà cadre dirigeante et en tant que femme j’avais privilégié une posture raide voir rigide pour m’imposer. Avec mon séjour à Vitória, j’adopte une autre façon d’être, plus authentique, plus naturelle. J’ai aussi appris plus l’humilité ». Emmanuelle LEROY CERQUEIRA a notamment postulé à l’Alliance Française mais elle n’est pas retenue. Au Brésil, elle prend du recul par rapport à ses pratiques de management et  revient plus à l’écoute. Ses proches collègues lui disent d’ailleurs « il y a un avant et un après Brésil ».

Enfin, elle peut observer durant quelques mois cette société brésilienne. Elle est notamment marquée par tous ces gens qui, quel que soit leur âge, se forment, s’inscrivent à l’université, « font parfois plusieurs heures de bus pour assister le week-end à des formations » et sont en perpétuelle réorientation. C’est un point auquel elle fera référence dans son nouveau poste sur l’Emploi à la CUD.

ET AU RETOUR ?

Dès le départ, l’idée est une disponibilité uniquement pour un an. « Mon mari est francophile – professeur de français- et l’ambiance au Brésil se dégrade et on observe un montée du religieux et de l’obscurantisme. Il souhaite venir en France ». Le projet familial est en France.

Le contrat moral passé avec son DGS est donc d’un an de disponibilité puis retour à Dunkerque.

D’ailleurs « je n’ai jamais coupé les liens avec la CUD ». Et trois mois avant le retour prévu, elle entame des discussions. Mais son DGS part à la retraite et son dossier est repris par la DRH qui ne lui propose pas de poste intéressant « Je suis sidérée quand la direction des ressources humaines me propose deux postes : un poste de chargée de mission « projets européens » (poste que j’ai créé en 2005), et un poste de chargée de mission « plan local d’urbanisme » (poste que j’ai encadré à un niveau n+2 de 2009 à 2012). ». Alors qu’elle avait une reconnaissance de ses compétences avant son départ, elle a l‘impression qu’elle doit tout recommencer à son retour. Emmanuelle LEROY CERQUEIRA a le sentiment qu’on lui reproche « une lune de miel d’un an ». Avec les premières propositions, le message lui semble clair : « elle se marie, elle part un an en vacances et après elle revient » « on ne peut avoir le beurre et l’argent du beurre / tu es partie un an, nous on est resté travailler ».

Résultat, lorsqu’elle rentre à Dunkerque en mai 2013, malgré l’anticipation, elle n’a pas de poste. La DRH lui demande 15 jours supplémentaires. « je m’attendais à ce que le retour soit difficile mais pas autant ».

Le nouveau DGS ne saisit pas l’ensemble de ses compétences « Lorsque le nouveau directeur général me reçoit à son tour, il déclare qu’il ne « voit vraiment pas quoi faire de moi » ». Elle va de petites missions en petites missions. L’idée d’un départ vers une autre collectivité la tente, mais le projet professionnel de son mari est désormais à Dunkerque et le couple fait le choix de rester en Flandre maritime. Finalement une jeune DGA « administratrice territoriale d’origine marocaine » s’intéresse à son  profil et lui propose un poste de directrice de projet en novembre 2015. En 2021 elle « reconquiert » un poste du niveau de celui laissé à son départ. Selon Emmanuelle LEROY CERQUEIRA, ce sont deux N+1, récemment arrivés à la CUD, qui reconnaissent son parcours et ses compétences.

Emmanuelle LEROY CERQUEIRA ne jette pas la pierre à la Direction des Ressources Humaines. « Les RH ne sont pas une entité partenaire, ils ne sont pas sollicités pour contribuer aux projets stratégiques de la collectivité mais ils sont cantonnés à la gestion administrative ». Pour elle, il est donc nécessaire de trouver des alliés à son retour car le système administratif n’a pas la capacité d’intégrer les apports de l’expatriation.

SON CONSEIL

Emmanuelle LEROY CERQUEIRA est très heureuse de cette expérience et repartira « au moins pour permettre à sa fille d’être scolarisée quelques temps au Brésil ». Mais ce projet familial sera préparé autrement, plus en lien avec les projets professionnels du couple.

Pour ceux qui souhaitent revenir dans leur collectivité, sur leur territoire, Emmanuelle LEROY CERQUEIRA conseille d’associer la DRH dès le début du projet pour dialoguer et préciser le processus d’apprentissage, de valorisation des compétences qui sont acquises. Emmanuelle LEROY CERQUEIRA reconnaît également l’utilité de poser une année sabbatique, pour prendre du recul, souffler, et explorer de nouveaux centres d’intérêt, extra-professionnels. L’allongement de la durée légale du travail et la complexité des problématiques économiques, sociales et environnementales que nous gérons avec nos métiers de service public imposent un autre rapport au travail. S’accorder des moments pour se régénérer est devenu, d’après elle, indispensable.

 

Entretien réalisé par Yannick Lechevallier

https://www.linkedin.com/in/yannick-lechevallier-23059819/

Août 2022


> Contacter sur LinkedIn