Le parcours
Caroline BASTIEN DERRIEN a passé un DEA/Master de droit public local à l’Université d’Orléans ainsi qu’un master en administration des collectivités locales en 1996, après un master en administration publique obtenu à Sciences Po Bordeaux en 1994.
Elle intègre tout d’abord Orléans Métropole de 1996 à 2002 où elle est successivement cheffe du service communication interne DRH, cheffe du service finances et personnel à la direction de la culture puis cheffe du service formation et recrutement DRH. En 2003 elle rejoint la ville de Bourges pour cinq années en tant que cheffe de service vie scolaire. Puis le Département du Cher la recrute pour une aventure qui durera neuf ans (2008 – 2017) comme cheffe de projet puis cheffe du service déplacements et enfin cheffe du service carrières et dialogue social.
En 2017, son mari a une opportunité professionnelle pour partir travailler, en tant que chef d’entreprise dans le numérique, à Toronto. Elle prend alors une disponibilité pour suivre son conjoint. Elle trouvera un contrat de neuf mois sur place (voir § SUR PLACE).
Retour en France en juillet 2018 pour un an et retour professionnel au sein du Conseil départemental du Cher. En août 2019, Caroline BASTIEN DERRIEN est nommée directrice du pôle services à la population au sein de la Communauté de communes Châteaubriant – Derval. Poste qu’elle occupe aujourd’hui.
Le départ
Le départ se fait en saisissant une opportunité : le mari de Caroline BASTIEN DERRIEN ayant une proposition professionnelle à Toronto, la famille (4 enfants) qui discutait déjà de voyages saisie l’occasion. L’avantage d’être fonctionnaire est, dans ces circonstances, de pouvoir prendre une période de disponibilité en sachant qu’au retour il y aurait un point de chute.
Les démarches s’enclenchent ensuite très rapidement. En premier lieu, la recherche de visa constitue l’étape la plus compliquée. Il faut vraiment connaître ou rencontrer un réseau car c’est très difficile pour décrocher la première autorisation. Ensuite une fois cette étape passée, c’est beaucoup plus simple pour le visa de travail du conjoint, la possibilité de prise en charge de la scolarité des enfants, etc.
Pour Caroline BASTIEN DERRIEN et sa famille, la demande est lancée en janvier 2017. Le départ effectif a lieu en août 2017.
C’est une période avec beaucoup de stress pour la famille, beaucoup de questions qui émergent au fil des semaines : l’idée alors est de ne pas trop réfléchir et d’attendre avec curiosité et impatience le fait de sortir de sa zone de confort (quitter une maison pour vivre en appartement en ville, la météo et le climat, les relations aux autres, la langue, la possibilité de trouver un travail pour Caroline, etc.). D’autant plus que ce départ n’est pas réalisé dans le cadre d’une mobilité au sein d’une grande entreprise, avec l’ensemble de l’accompagnement qui peut en découler. Caroline BASTIEN DERRIEN et son mari gèrent seuls. Et là, « il ne faut pas lésiner sur l’engagement » prévient-elle.
Le fonctionnement sur place
Caroline BASTIEN DERRIEN part d’abord dans le cadre d’un rapprochement de conjoint. C’est dans un premier temps son mari qui fait œuvre de mobilité professionnelle. Elle part alors totalement à l’aventure, sans plan préétabli. Mais c’est l’avantage du continent américain et notamment du Canada : tout est possible. En s’adressant à une structure d’intégration des francophones pour retravailler son CV et comprendre comment se positionner, la Société Économique de l’Ontario (SEO) lui propose une intégration en interne. Caroline BASTIEN DERRIEN collabore d’abord en tant que bénévole sur une idée que la SEO avait puis, au bout de trois semaines, sur un budget interne, Caroline BASTIEN DERRIEN est alors recrutée pour un CDD de neuf mois en tant que coordinatrice du projet d’accompagnement sur l’employabilité.
L’impression première que Caroline BASTIEN DERRIEN retient de ce contact, c’est « l’efficacité redoutable » au Canada. Il y a une opportunité, on la saisit (la fin pouvant être tout aussi rapide). Dans la pratique, au quotidien, le choc avec sa culture territoriale est fort. Ainsi Caroline BASTIEN DERRIEN rapporte plusieurs étonnements de cette expérience au Canada :
- Les rapports hiérarchiques très forts en France (élus, DG, etc.) disparaissent, d’abord parce qu’elle a rejoint une société privée mais aussi parce que la confiance interpersonnelle est beaucoup plus dans les structures canadiennes ;
- Les horaires de travail l’interpellent aussi, avec un arrêt quasi systématique des journées à 17h (bien que Toronto étant une capitale économique avec beaucoup de sièges internationaux, cela varie un peu du reste du Canada).
- La posture de valoriser constamment le travail réalisé est aussi bien reçu, même si cela peut parfois limiter la progression (voir § ENJEUX PERSONNELS).
Les relations avec la collectivité en France
Le départ s’est très bien passé et la collectivité a bien compris la situation.
A son départ, Caroline BASTIEN DERRIEN est remplacée. Puis lorsque le retour vers la France s’annonce, au bout de onze mois, elle prévient rapidement sa collectivité employeur. Celle-ci accepte bien volontiers de la reprendre mais après huit ans dans la collectivité départementale, Caroline BASTIEN DERRIEN fait part de ses souhaits de changer de fonctions et de découvrir d’autres horizons. D’autant que le poste quitté par Caroline BASTIEN DERRIEN huit ans auparavant, les RH, étant très stratégique, difficile d’être reprise dans le même poste alors que des stratégies avaient été lancées… Caroline BASTIEN DERRIEN retrouve ainsi un poste dans un autre service. Mais très rapidement, elle s’est mise à chercher un autre employeur. Elle poste ainsi un article sur LinkedIn : https://www.linkedin.com/pulse/apr%C3%A8s-la-travers%C3%A9e-de-latlantique-des-envies-douest-bastien-derrien/ où se traduit rigueur, envie et bienveillance (voir § Enjeux personnels).
Et après ?
Qu’est-ce qu’une expérience à Toronto peut apporter dans un parcours RH de la fonction publique territoriale où tout est (souvent) normé, balisé, où il vous faut cocher des cases pour progresser plus que d’enrichir un CV… ?
Ainsi, si Caroline BASTIEN DERRIEN reconnait un bel enrichissement au plan personnel et familial, cette expérience est très difficile à valoriser auprès des employeurs publics : au final cette ligne supplémentaire dans son CV ou son profil ne se traduit pas vraiment comme un atout lors de ses entretiens pour un nouveau poste. D’autant plus incompréhensible qu’au Canada, le travail de Caroline BASTIEN DERRIEN était de valoriser les compétences transversales. Elle prend alors conscience de la rigidité des postures RH de la fonction publique territoriale pour qui, « si vous n’avez pas suivi la filière, quelques soient vos « capacités d’apprendre » ou d’adaptation, « vous n’aurez jamais la connaissance du cadre technique du domaine pour pouvoir assumer telle ou telle responsabilité » : tout l’inverse de la culture canadienne que Caroline BASTIEN DERRIEN a découverte lors de cette expatriation.
Cette incompréhension de la valeur d’un profil atypique, Caroline BASTIEN DERRIEN l’a de plus rencontré dans les entretiens avec les directions RH mais aussi avec les cabinets de recrutement. Ce qui laisse présager un gros travail pour faire évoluer les pratiques et les conceptions dans notre société.
Les enjeux personnels
Ce profil atypique, Caroline BASTIEN DERRIEN l’a vu s’enrichir fortement à Toronto.
Tout d’abord, en tant que Française, elle se rend compte de la force de son travail du fait d’une culture rigoureuse, très « carrée » au plan de la méthode (parfois tendance « pointilleuse » pour les Canadiens) avec une posture qui permet une critique positive : on pointe ce qui ne va pas dans l’idée de l’améliorer, de progresser.
Très différent donc de la situation locale qui voit dans un premier temps « le verre à moitié plein », qui félicite, et vérifie que « tout se passe bien » et favorise ainsi plus la collaboration plutôt que la compétition… C’est une vraie force aussi dans la création d’un environnement de travail bienveillant. Et c’est un vrai bonheur pour la Française d’évoluer un temps dans cette ambiance.
Pouvoir alors faire la synthèse entre rigueur et bienveillance est une chose que Caroline BASTIEN DERRIEN retient de cette expatriation.
Son conseil
Le premier conseil est de partir en expatriation en famille en pensant, dans son cas, que c’est une parenthèse et non un projet pour la vie. Bien choisir la ville apparait tout autant important que choisir le pays pour trouver de ce qui est recherché dans l’expatriation.
Il faut réfléchir à cette recherche, aux conditions, tout en acceptant l’incertitude inhérente à ce type de projet familial : on sait qu’on aura des difficultés, qu’il y a une prise de risques mais cela forge et valorise votre capacité d’adaptation.
L’adaptabilité, la volonté de s’adapter à un autre environnement est la première qualité pour une expatriation réussie. Pour cela il faut rester humble, « mettre de côté » l’arrogance française qui nous a été transmise par l’éducation, l’histoire (« La France, ce grand pays », …) et c’est alors que la formule « rester ouvert » prend du sens.
Autre point, lorsque l’on part au Canada, on se rend compte de la chance en France de disposer d’un « État providence » et de son action pour la santé, l’éducation, etc… Un premier conseil est donc de partir avec une petite réserve financière car en la matière les dépenses peuvent s’annoncer importantes… il faut tout payer ou du moins avancer financièrement.
Enfin, un départ en expatriation, c’est aussi un éloignement des proches, une séparation durant de longs mois, ce qui peut être parfois difficile sur le plan personnel. Comme c’est un projet familial, Caroline BASTIEN DERRIEN conseille au-delà des réflexions sur l’expérience professionnelle, de prévoir des visites et des expériences exceptionnelles à vivre dans le pays où l’on séjourne pour se fabriquer des souvenirs utiles au retour.
Fiche rédigée par Yannick Lechevallier
2020