Barbara PETRI


KosovoRéseau France (MEAE, Alliance française, Expertise France, …)Organisation internationaleAutreAutrePlus de cinq ansSénégal

Barbara PETRI a 51 ans. Très engagée d’abord par ses études sur les questions de solidarité internationale, elle rejoint la Mission de maintien de la paix des Nations Unies au Kosovo . A son retour en France, du fait de cette expérience, le Département du Rhône la recrute pour gérer le territoire de Vaulx-en- Velin. Elle prendra ensuite un poste pendant plus de six ans au Sénégal, comme Experte Technique Internationale (ETI) auprès du ministre des collectivités territoriales. Elle est aujourd’hui consultante sur les projets internationaux de décentralisation et de développement.
Entretien réalisé en février 2023.

Son parcours

Après un master en Langues étrangères et relations internationales, Barbara PETRI part un an aux Etats Unis comme assistante de recherche à l’Université de Delaware et sera ensuite chargée de mission au sein de l’Alliance Française du Delaware. A son retour, elle s’inscrit à l’Université Marc Bloch de Strasbourg et pour mener une thèse de sociologie et relations internationales « Sport policies and Sports solidarity in International Organisations : an analysis of the legal and socio-political strategies of international organizations. » ; ses recherches seront financées par le Comité International Olympique et l’Université J. Guetenberg de Mainz en Allemagne

A la fin de ses recherches et après plusieurs distinctions, Barbara PETRI décline la proposition d’intégrer l’université et la fonction publique. En janvier 2003, elle part au Kosovo pour les Nations unies sur un contrat court auprès du nouveau Ministre de la culture, de la jeunesse et des sports. Elle travaillera finalement cinq années, notamment pour les Nations Unies et l’OSCE.

En 2008, elle répond à l’appel d’offres du Secrétaire Général d’INTERPOL à Lyon pour une mission d’appui stratégique au développement de mécénat et de partenariat public privé. Son unité, le « Global Security Initiative » deviendra le cœur d’un nouveau siège de l’organisation à Singapour.

En 2009, elle est recrutée par le DG du Département du Rhône comme directrice de territoire. Elle gère le canton de Vaulx-en-Velin durant trois ans. Après quelques mois et quelques changements (« j’ai dû renouveler toute l’équipe de direction en six mois pour retisser une équipe de confiance autour d’un projet nouveau et collectif »), elle mène cette mission jusqu’à la naissance de sa troisième fille et un congé maternité qui l’éloigne. A son retour, elle ne souhaite pas revenir sur les mêmes fonctions. Le Département lui propose une autre mission tout aussi épineuse : la gestion du « dossier des Roms ».  puis le poste de responsable des actions éducatives dans un contexte « post-Charlie Hebdo ». Les élections départementales changent les orientations et l’appel international revient. Elle refuse une seconde fois d’intégrer la fonction publique (territoriale cette fois) : « concrètement, en termes de salaire, de déroulement de carrière et de retraite, à cette phase de ma carrière, l’écart était trop important entre ce qui m’était proposé dans la territoriale et le milieu international ».

En 2016, elle part au Sénégal sur un poste d’ETI de la Délégation de l’Action Extérieure des Collectivités Territoriales (DAECT/MEAE) auprès du ministre sénégalais des collectivités territoriales comme conseillère technique en charge de la décentralisation et de la coopération décentralisée. Elle y restera six ans et demi.

En 2022, elle rentre en France. Mais elle ne cherche pas à retrouver une collectivité (elle n’est pas fonctionnaire). Elle crée sa structure de conseil Orisha Consulting. Basée à la Seyne-sur-Mer, elle mène différentes missions nationales et internationales, notamment sur l’évaluation de projet et le management.

Ses entrées dans ses missions

Pour son départ vers le Sénégal, Barbara PETRI est en veille pour un nouveau poste depuis quelques temps : « les élections départementales et l’évolution de la situation en France après les attentats de Charlie modifient le cadre de ma mission ». Elle voit dans une newsletter de l’ARE (Assemblée des régions d’Europe) une offre d’emploi pour le compte de la DAECT. Elle se connecte sur Transparence et dépose sa candidature « sans trop y croire » en juillet 2015. Fin juillet, à son retour de vacances, elle a reçu un courriel pour un entretien. Elle s’organise pour venir sur Paris (« à mes frais, ce qui m’étonne par rapport aux expériences de l’ONU ») et elle est retenue. Le MEAE veut alors l’envoyer rapidement en poste mais elle doit clôturer son contrat au Département. Elle négocie de faire 2 mois de préavis. A quelques semaines près, après 6 ans au Département, Barbara PETRI était « CDIsée », mais en fait, elle refuse d’intégrer à nouveau la fonction publique. « Ce point a intrigué la DAECT lors de mon recrutement ».

Mais en arrivant, première inquiétude : « la DAECT avait omis de m’informer de la réforme des ETI ». Barbara PETRI avait organisé le déménagent de toute la famille, avec ses trois filles, 40m3 de meubles et affaires diverses et on lui annonce que le poste risquerait finalement de disparaitre d’ici quelques mois… Finalement son poste est l’un des postes d’ETI a être conservé et elle passe sous contrat avec Expertise France en 2018, pour quatre années supplémentaires.

Le fonctionnement sur place

Au Sénégal, Barbara PETRI est placée auprès du ministre des collectivités territoriales, détachée par la DAECT mais dépend de l’ambassade. A son arrivée, elle propose une première stratégie à l’ambassadeur en poste. Puis celui-ci change et elle doit reprendre l’explication et sera activement soutenue. Après trois années, un nouveau changement se réalise. On lui demande alors de rester quatre années supplémentaires, elle gardera un soutien actif de l’ambassade…

Au Conseil départemental, Barbara PETRI travaille étroitement avec les élus locaux. Au Sénégal, elle retrouve cet environnement et ce lien élu-administratif : « on doit rester dans le soutien, à chaque question je propose trois options pour laisser la décision au politique ».

Barbara PETRI a toujours souhaité connaître le terrain sur lequel elle travaille. En arrivant, elle a entre autres la charge de la coopération décentralisée. Elle va dès son arrivée en poste organiser six semaines de mission de terrain pour réaliser le tour des projets au Sénégal (« j’ai fait 20000 kms par an ») ; méthode de travail qu’elle appliquera deux fois par an tout au long de son mandat.

Au bout de 5 années (« dont trois ans avec le même ministre des collectivités territoriales avec lequel j’ai pu réaliser un travail extraordinaire »), elle commence à vouloir changer et se positionner sur d’autres fonctions. « Notre seconde fille passe son Bac ». Elle demande d’autres affectations mais Expertise France souhaite la maintenir au Sénégal jusqu’à la fin de sa mission. A la fin de son mandat, Barbara PETRI décide d’ouvrir un nouveau chapitre pour sa vie professionnelle en revenant en France et en s’installant comme consultante indépendante.

Les enjeux personnels

En termes personnels, la candidature au Département a été discutée en famille. « Passer d’une organisation internationale à une collectivité implique une décote financière importante pour la famille. J’ai eu un soutien de mon mari pour cela ». Elle accepte aussi le poste au Département pour pouvoir justifier d’une expérience professionnelle en France dans son CV.

Et les retours ?

Le premier « retour » après le Kosovo se passe à Lyon. « J’étais assez sceptique sur ma capacité à trouver un poste à Lyon. Les parcours internationaux ne sont pas valorisés en France, que ce soit dans le public ou dans le privé ». Après sa mission à INTERPOL en 2009, elle essaye de postuler auprès de différentes structures, notamment des collectivités et la Région, sur les relations internationales sans retour positif. Elle passe un entretien pour un poste de responsable Relations internationales dans une commune. Mais on ne la retient pas « car je n’avais pas d’expérience en collectivité territoriale française! ».

Finalement, c’est le DG du Département du Rhône qui, voyant sa candidature, la positionne sur son nouveau poste en 2009 : « vous avez fait le Kosovo vous serez parfaite pour Vaulx-en -Velin ». Son expérience de management en situation complexe s’est en effet avérée fort utile pour pouvoir gérer à la fois des domaines très différents (routes comme protection de l’enfance) avec des équipes installées depuis de nombreuses années « sans mobilité ». A son premier jour d’arrivée elle doit gérer un suicide sur le lieu de travail et une grève intersyndicale : « ce fût dur mais passionnant, dans une continuité avec le Kosovo ». « J’ai alors capitalisé sur mon expérience du management à l’ONU avec la pratique du changement : normalement on reste maximum 2 ans à un poste. » Elle va devoir apprendre comment fonctionne l’administration sans rien lâcher de la mission pour laquelle elle est nommée. « J’étais tellement étrangère, je ne connaissais pas les codes : voir comment les équipes travaillaient était passionnant ». Mais en même temps « ils étaient persuadés qu’on était venu me chercher au Kosovo pour cette mission ».

Pour son retour du Sénégal, en 2022, Barbara PETRI se pose à la Seyne-sur-Mer. Elle souhaite valoriser ses multiples missions et expériences dans une fonction de conseil. Elle a donc créé sa société. Son attrait pour l’international reste mais elle n’est pas exclusive sur les missions  : « je me laisse deux années pour voir comment cela fonctionne ».

Son conseil

Arriver en poste avec une « ardoise blanche » avec l’envie d’apprendre et de s’enrichir plus que de vouloir conseiller. Cette posture de bien s’imprégner du contexte permet de garder la distance nécessaire à l’observation, l’humilité quant à son savoir-faire par rapport à ce qui est déjà en place et fonctionne et le regard analytique objectif pour proposer ensuite un appui technique.

 

Entretien réalisé par Yannick Lechevallier

https://www.linkedin.com/in/yannick-lechevallier-23059819/

Février 2023


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