Son parcours
A la suite d’un master à l’Université de Strasbourg en Histoire du Droit et des Institutions, Arnaud DESBROSSES suit une période de formation à l’école d’administration de la Marine Nationale et réalise quelques expériences de navigation. Il débute son activité professionnelle comme Officier du Corps Administratif et Technique au sein de la Marine Nationale Française en 1996. Il y reste 16 mois avant d’intégrer le Conseil Général du Haut Rhin au poste de Chef de la cellule Marchés Publics début 1997 pendant 4 ans. Il profite de cette période pour suivre un Master II en administration et gestion des collectivités locales et passe le concours d’attaché territorial.
Début 2001, il change de collectivité et rejoint la commune de Bischheim comme Directeur des Ressources Humaines et des Affaires Juridiques. Il est responsable de la gestion du personnel communal soit environ 300 personnes.
En 2005, Arnaud DESBROSSES réussi le concours d’administrateur territorial et quitte son poste pour intégrer l’INET. Il est titularisé comme administrateur territorial après 2 années à Strasbourg. En mars 2007, , il est recruté par le Conseil Départemental de la Côte d’Or comme Directeur des moyens généraux dans un premier temps avant de passer DGA Solidarité et Famille.
Arnaud DESBROSSES n’avait pas pu réaliser une année à l’étranger dans le cadre d’un échange Erasmus+ alors qu’il nourrissait une véritable envie. Durant un an, il essaye de se renseigner sur les possibilités de partir : « il y avait peu d’informations et cela semblait difficile ». Il identifie des possibilités dans les institutions européennes ou les missions courtes avant de prendre connaissances du dispositif « pastel » sur les postes dans le réseau diplomatique français. Il postule.
De 2012 à 2014, il part à Yaoundé au Cameroun comme Conseiller Technique du Ministre de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation.
A son retour, il revient quelques mois au Département de Côte d’Or mais ne reste pas. « Je me positionne dans le mercato qui suit les élections municipales ». En juillet 2014, il rejoint le nouveau Maire de Rillieux la Pape comme Directeur General des Services. Il reste à ses côtés tout au long de ce mandat.
Mais l’international continue à le mobiliser. Il réalise des missions courtes (quelques jours à quelques semaines) pour Expertise France en Tunisie, pour le CNFPT ou l’Union Européenne en Algérie ou au Liban, pour l’ENA en faveur de l’Arménie, ….
En 2021, il part à la Ville de Montluçon comme Directeur Général des Services.
En 2023, il revient auprès du Maire de Rillieux la Pape où il occupe depuis octobre, le poste de DGS et Directeur de Cabinet.
Le fonctionnement sur place
Pour sa première mission internationale, Arnaud DESBROSSES avait postulé pour l’Asie. Mais le Ministère lui propose finalement le Cameroun. S’il part un peu à reculons, cette expérience deviendra vite particulièrement enrichissante tant personnellement que professionnellement. Quand il prend ses fonctions à Yaoundé auprès du Ministre de la Décentralisation « c’est un choc culturel complet : tous mes points de références disparaissent ».
Son premier défi est de comprendre le fonctionnement du Ministère des Affaires Etrangères, son employeur : « une vielle dame distinguée avec une agilité très contrainte». Il lui faut comprendre les différents usages, la hiérarchie importante, le rôle du Consulat et le rapport à l’Ambassadeur. Son poste reste particulier. En tant qu’ETI – Expert Technique International auprès du Ministre camerounais il est à la fois au-dedans mais aussi au dehors des services de l’ambassade. Même s’il n’est pas totalement lâché dans la nature, il souffre dans un premier temps d’un certain isolement et ne comprend pas ce que l’on attend de lui.
Son second défi est de se faire accepter auprès d’un Ministre du gouvernement camerounais et de son équipe. « Comment tisser des liens pour trouver des appuis, comment travailler avec un SG qui tolère l’ETI pour des raisons diplomatiques ? etc. » Arnaud DESBROSSES prend la suite d’un précédent ETI qui avait marqué les esprits et participé à la rédaction du projet de décentralisation. Sa mission était donc de mettre en œuvre ces textes. C’est alors « une école d’humilité et de modestie où chaque petite avancée est une victoire ». Il comprend précisément que rien ne peut se faire sans une appropriation réelle des acteurs : il observe un fort décalage entre les demandes des PTF (Partenaires techniques et financiers internationaux) et la réalité des croyances et demandes des populations. « On avait besoin de creuser davantage le besoin et susciter l’adhésion ». « Parfois on est un peu désespéré puis on a des résultats positifs. On avance peu à peu et tout est fragile… » et surtout veiller à ne pas se substituer aux acteurs ce qui parfois engendre de la frustration.
Les enjeux personnels
Pour cette expatriation et dans un premier temps, Arnaud DESBROSSES part en février 2012 sans sa famille qui le rejoint quelques mois plus tard. A son arrivée, il y a les difficultés habituelles pour trouver un logement. Il passe par la communauté française « il ne faut pas idéaliser l’entraide, personne ne se fait pas de cadeau » – il cite comme exemple la revente de meubles entre expatriés qui partent avec ceux qui arrivent en cherchant bien sûr à maximiser les profits… Il faut alors « faire preuve de pragmatisme ».
Il part à une période encore calme : « on bougeait le WE avec de petits voyages en voiture. A l’époque, il n’y avait vraiment des problèmes de sécurité ».
Quand il rentre, « j’avais énormément de choses à dire aux gens ». Face à l’intensité de ce qu’il a vécu, il pense que naturellement, cela va intéresser. « Et bien pas du tout. On ne nous pose aucune question et cela n’éveil pas du tout l’attention »
Et le retour ?
A la fin de son contrat avec le MAEE et plus à l’aise dans un contexte international, , Arnaud DESBROSSES est confronté à un choix : soit il s’oriente totalement dans l’expertise internationale et se met en disponibilité de la territoriale, soit il décide de revenir pour poursuivre sa « carrière ». Il choisit de revenir en France en profitant du mercato des DGS liés aux élections municipales du printemps 2014.
Le retour est sévère à la fois en perte de niveau de vie (-60% de revenus par rapport à des conditions d’expatriés) mais surtout avec – 25% par rapport à son salaire de DGA perçu avant son départ : « je redeviens chargé de mission sans encadrement ni responsabilités particulières ». D’une manière générale, le regard sur cette expérience n’est pas très valorisé et parfoit vu comme : « une prise de longues vacances où je n’ai pas fait grand-chose ». Et même lors de son entretien pour son recrutement en tant que DGS, son expérience au Cameroun est peu abordée. « J’ai surtout eu un soutien du cabinet de recrutement qui insistait sur les apports de cette expérience ».
Après 3 années à son nouveau poste de DGS, il a l’opportunité de faire une mission d’expertise court terme pour Expertise France en Tunisie : « dans le cadre d’un groupe d’experts franco-tunisiens je participe à la rédaction des décrets d’application du code des collectivités locales tunisiennes. » Son profil circule ensuite et il part à nouveau pour le CNFPT, l’Europe ou l’ENA.
« J’ai toujours souhaité faire des missions courtes car c’est à chaque fois une belle expérience enrichissante pour confronter ses pratiques. Cela maintient dans un état d’éveil intellectuel ».
Depuis Arnaud DESBROSSES poursuit ses interventions (encore dernièrement en Tunisie dans un programme d’appui aux Secrétaires généraux de Mairies – https://www.linkedin.com/posts/adesbrosses_atelier-de-diagnostic-et-leviers-de-performance-activity-7198364255052541953-Kkb9?utm_source=share&utm_medium=member_desktop ). Il est sollicité par le réseau entre les différents acteurs de l’appui à la décentralisation. Mais cela reste encore limité : « les acteurs du développement ne connaissent pas bien les métiers des DGS et de la territoriale ». La visibilité de ce type de fonctions est encore très faible en dehors du monde la territoriale Cette méconnaissance peut parfois conduire à sous-estimer la place des fonctionnaires dans la conduite des projets et des processus de décision.
A chaque mission « on retrouve du sens à l’action, on en retire systématiquement une remobilisation ». Pour lui, ces missions courtes le font sortir de sa zone de confort : « je dois monter une intervention propre à chaque contexte. Parfois, on construit le matin pour l’après midi et répondre à une demande spécifique. Cela est exigeant mais très formateur et stimulant. On est dans l’innovation permanente. »
De plus ces missions courtes (« une semaine c’est le maximum ») lui permettent de ne pas s’absenter trop longtemps de son poste. Et avec Internet, il reste joignable constamment pour les urgences, les questions importantes, que cela soit pour son Maire ou pour les agents : « c’est un engagement avec mon exécutif ; même en congé je garde le contact ». Les collègues gardent l’impression qu’il part loin mais avec Internet, tout a changé.
Son conseil
Pour Arnaud DESBROSSES, les missions d’appui ne peuvent être des missions de transferts. « Il faut d’une certaine manière avoir une approche anthropologique et adopter une méthode qui permet de déconstruire nos représentations. Dans la conduite de mission, il est nécessaire de passer par ce filtre anthropologique pour comprendre lesacteurs du programme. Il faut alors rester modeste dans l’approche et avoir la capacité, très rapidement, de reformuler les exercices envisagés pour coller au mieux aux demandes et cadres ».
Selon lui, la mobilisation des territoriaux dans les coopérations est essentielle. « Là où l’Etat se délite, c’est par les acteurs des territoires que cela peut encore passer ». D’autant que dans un contexte de dégradation de l’image de la France à l’international, la liberté de parole des territoriaux mais aussi leur capacité de dialogue de pairs à pairs concourent à retisser du lien.
Entretien réalisé par Yannick Lechevallier
https://www.linkedin.com/in/yannick-lechevallier-23059819/
Avril 2024