Après un DUT – Diplôme Universitaire Technologique- en Hygiène et Sécurité, et la réussite au concours de lieutenant, Alain CHUFFART intègre la fonction publique territoriale avec une première expérience à la communauté urbaine de Lille en 1989.
Il entre parallèlement à l’ENSOSP – École Nationale Supérieure des Officiers de Sapeurs-Pompiers de 1990 à 1991. Il en sort avec le grade de Lieutenant. Avec ce diplôme il rejoint, en 1992, le SDIS 15, à Aurillac, en tant que Chef de Service Opération – Prévention – Transmission.
Après 3 années et 7 mois, il part au SDIS 16 à Angoulême. Il n’y reste que 21 mois et en 1997. Il est recruté par le SDIS 27 comme chef de corps et inspecteur adjoint du Directeur. Il reprend son parcours de formation à l’ENSOSP pour devenir Capitaine.
Il restera à ce poste durant trois ans.
En 2000, Alain CHUFFART arrive au SDIS 59 du Département du Nord, dont statutairement, il fait toujours parti. Au cours des 16 premières années, il y occupe différents postes. En 2006, il suit une nouvelle formation à l’ENSOSP (formation d’adaptation à la fonction de Chef de Groupement) et de 2006 à 2016, il est directeur de la Prévention.
Parallèlement à ce parcours professionnel, Alain CHUFFART réalise des missions courtes à l’international : à partir de 2004, sur un coup de chance et par relation, il remplace un collègue pour une formation au Maroc organisée par la DCSD (Direction de la Coopération Sécurité et Défense) du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. À partir de cette première expérience, et du fait de son activité de formateur en France, il lui est demandé de réaliser 8 missions de formation (souvent sur une semaine) entre 2004 et 2018, toujours dans ce pays.
En 2017, il obtient d’être affecté à l’État-major de la Zone de Défense et de Sécurité Nord.
Il s’occupe, en autres projets, de la rédaction du CoTRRiM zonal (Contrat Territorial de Réponse aux Risques et aux effets potentiels des Menaces) et coordonne la rédaction des 5 CoTRRiM départementaux.
Il est aussi appelé pour participer à une mission pilotée par l’Union européenne au Mali, toujours comme formateur (3 missions pour un total de 4 semaines entre 2017 et 2018). Dans le cadre de ses activités de formateurs à l’ENSOSP, il avait dispensé des formations avec un des experts locaux qui recommande son nom.
Si Alain CHUFFART se construit ainsi quelques expériences à l’international, il n’est pas encore parti en expatriation long terme. Mais il est à une période de sa vie où il souhaite un changement.
C’est en 2018 qu’il postule à une offre pour devenir ETI à Rabat, auprès des autorités marocaines. Ils sont sept candidats : il est retenu, sans doute en partie grâce à l’expérience construite au fil des ans dans la formation. Il demande alors un détachement à son SDIS qu’il obtient en 10 jours (le SDIS est en réorganisation et un cadre qui part est un cadre de moins à placer dans l’organisation).
Il est recruté pour un premier contrat de deux ans comme Expert Technique International -ETI – « Protection Civile » dans le cadre de la coopération institutionnelle entre les autorités françaises et autorités marocaines.
En 2019 et 2020, son contrat est prolongé d’un an pour un total de quatre ans.
Le fonctionnement sur place
Lorsque Alain CHUFFART est appelé au Maroc en septembre 2018, il est en cours de divorce et ses enfants sont autonomes. Il part donc seul avec simplement deux valises.
Pour les contrats avec le MEAE, un tuilage n’est pas formellement prévu. Toutefois, Alain CHUFFART, au cours d’une mission de formation, début 2018, saisit l’occasion de rencontrer l’ETI qu’il remplacera. Il prend aussi une semaine de vacances en août 2018 pour venir, à ses frais, le rencontrer et mieux saisir le contenu et les enjeux des dossiers (le Maroc est proche et un aller-retour est peu onéreux).
A l’arrivée à Rabat, Alain CHUFFART est accueilli dans une ambassade importante pour le réseau diplomatique français. Il peut d’ailleurs bénéficier d’un accès simplifié à un logement, dans un bâtiment qui est la propriété de l’Ambassade (il reprend le logement meublé de son prédécesseur).
Le fonctionnement est bien défini dans le cadre de sa mission avec trois référents au sein de l’administration : la DCSD (Direction de la Coopération de Sécurité et de Défense) du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères qui pilote le projet, la DGSCGC -Direction générale de la Sécurité civile et de la gestion des crises- du ministère de l’Intérieur et la Direction de la Coopération Internationale du ministère de l’Intérieur (DCI)
Alain CHUFFART n’a pas de difficulté à se fondre dans le dispositif de coopération et l’organisation hiérarchique de l’Ambassade.
« Lorsque l’on part dans un pays étranger, on se retrouve face à une autre culture ». Alain CHUFFART « partant seul, les contraintes sont plus limitées » mais il faut tout de même un temps d’adaptation.
Il se prépare en lisant différents ouvrages et notamment le Coran (« l’islam est religion d’État au Maroc et lire à la source permet de comprendre sans les interprétations parfois erronées rencontrées ») ou des livres sur l’histoire du Maroc. Il ne parle pas l’Arabe mais l’Ambassade lui propose toutefois des cours pour apprendre quelques rudiments. Cette posture de curiosité est appréciée de ses interlocuteurs marocains et facilite l’exercice quotidien de sa mission. Avec ces connaissances, il peut notamment demander aux différents formateurs d’adapter leurs formations en fonction des contextes rencontrés pour travailler efficacement et en bonne entente avec les partenaires marocains.
Au plan personnel, même s’il loge dans un immeuble destiné aux expatriés, il a tissé des liens au fil de ses missions de formation avec des pompiers marocains ce qui lui permet aussi de sortir du milieu expatrié français et de découvrir le pays : « il y a le réseau des expatriés Rabat Accueil mais je n’ai pas eu le besoin d’y entrer ».
Et au retour ?
La question du retour ne se pose pas encore pour Alain CHUFFART. Il peut encore envisager de rester pour une prolongation d’une année. Ensuite, il sera difficile de postuler un nouveau poste d’ETI : sur la protection civile aujourd’hui il n’y a que 18 postes dans la totalité du réseau MEAE et seulement 8 sont occupés par des personnes issus du corps des Sapeurs-Pompiers Professionnels.
Mais il sait déjà pertinemment que cette expérience internationale sera peu reconnue dans les entretiens en France : « pour les recruteurs, souvent, on est parti 4 ans en vacances ».
D’ailleurs, son SDIS, au-delà des échanges administratifs épistolaires (pour les questions de détachement essentiellement) n’a pas cherché à connaître les détails de sa mission et il n’y a eu aucune communication ou valorisation du fait qu’un de leurs agents soit expatrié sur une mission de coopération internationale.
Il cherchera sans doute à évoluer dans une organisation nationale pour laquelle son expérience sera valorisante.
Au plan personnel, comme tout expatrié, Alain CHUFFART reconnaît que cette expérience l’aura marqué. Dans un premier temps, pour lui et pour tous les formateurs sapeurs-pompiers qui participent à ce genre de missions, cela développe les capacités d’adaptation. Au regard des conditions rencontrées, chaque fois il est nécessaire d’adapter au mieux les formations construites en France pour qu’elles conviennent aux personnes rencontrées et aux environnements : « on conforte notre capacité de réaction à l’imprévu », « tous les soirs on réadapte nos cours importés de France ».
Au plan professionnel, Alain CHUFFART se dit qu’il portera dans son futur poste, une « attention plus soutenue aux rapports humains » plutôt que de s’appuyer sur toujours plus de procédures, notamment dans une position de management. Il a retrouvé cette valeur de l’humain dans ces missions au sein d’équipes qui ont beaucoup moins de moyens que les SDIS en France mais qui développent, pour dépasser cela, une ingéniosité par des relations humaines renforcées. Cette capacité d’improvisation qu’il a rencontrée, dans ses différentes missions, due souvent à des manques de moyens, fait que « tout est possible ». Ainsi « même si parfois quelque chose de simple peut être long à obtenir, inversement jamais rien n’est impossible ». La capacité d’écoute et d’attention lui semble démultipliée et il souhaiterait pouvoir faire apprécier cela en France.
Au final, à son retour, il aimerait organiser des formations en France, menées par des experts marocains, si l’occasion se présente.
Ses conseils
Alain CHUFFART insiste sur la posture humble qu’il est nécessaire de conserver dans un poste de coopérant. D’une part, « vous portez constamment la réputation de la France et il est nécessaire d’avoir cela à l’esprit même dans les relations amicales ». D’autre part, au-delà du poste « d’expert » la rencontre vous enrichit fortement.
Pour cela, il faut abandonner la posture « du Français sûr de tout » et toujours « rester prudent dans la relation » en demandant régulièrement à mieux comprendre.
Fiche rédigée par Yannick LECHEVALLIER
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Juin 2021